Fédération FO de la Métallurgie

L’efficacité réformiste

Dossier/Evénement

Du bon usage du budget de fonctionnement du comité d’entreprise…

Nous avions déjà alerté les équipes sur le sujet, la Cour de cassation vient de trancher la question dans un arrêt du 27 mars 2012 (n°11-10825) : le budget de fonctionnement du comité d’entreprise doit être utilisé conformément à son objet et ne peut, en aucun cas, financer certains achats pour des sections syndicales.

Nous avions déjà alerté les équipes sur le sujet, la Cour de cassation vient de trancher la question dans un arrêt du 27 mars 2012 (n°11-10825) : le budget de fonctionnement du comité d’entreprise doit être utilisé conformément à son objet et ne peut, en aucun cas, financer certains achats pour des sections syndicales.

L’affaire concerne un comité d’entreprise dont les membres décident en février 2009, par deux délibérations :

- de créer une bourse de formation syndicale destinée à prendre en charge les coûts de formation syndicale des membres du CE pour des formations dispensées sous l’égide de syndicats représentatifs au niveau national et dans l’établissement ;

- d’instaurer une bourse d’informations syndicales destinée à prendre en charge les coûts d’abonnement à la presse syndicale des élus, des représentants syndicaux, des délégués syndicaux et autres mandatés d’une organisation syndicale représentative au niveau national et dans l’établissement.

Mécontente de ces décisions, la direction agit en référé devant le tribunal de grande instance. Selon elle, les membres du comité d’entreprise font un mauvais usage du budget de fonctionnement versé au comité. Elle demande donc au juge d’ordonner la suspension des délibérations litigieuses. Le comité d’entreprise se défend sur le fait que la loi ne fixe pas de liste exhaustive des dépenses pouvant être imputées sur le budget de fonctionnement du comité d’entreprise. Ainsi, rien ne l’empêche, selon lui, de décider librement de cette utilisation par une délibération prise par les membres du comité eux-mêmes. Le juge des référés donne malgré tout raison à l’employeur : les délibérations sont illégales. Le comité forme un pourvoi en cassation.

Rappelons qu’il existe deux budgets distincts alloués au comité d’entreprise :

- le premier, le budget de fonctionnement, est destiné à couvrir les dépenses engagées pour son fonctionnement et pour l’exercice de ses attributions économiques (L.2325-43 CT). Son montant est fixé à 0,2% de la masse salariale brute ;

- le second, le budget des activités sociales et culturelles, est, quant à lui, destiné à financer des activités sociales et culturelles au profit des salariés et de leur famille. Son montant n’est pas déterminé à un taux fixe par la loi, mais dépend des pratiques de chaque entreprise (L.2323-86 CT).

A quelles fins peut-on utiliser le budget de fonctionnement ? Aucune règle générale n’est fixée par la loi. Certaines dépenses s’imputent, obligatoirement ou non, sur le budget de fonctionnement :

- les frais liés au fonctionnement du comité d’entreprise : fournitures de bureau, frais de communications téléphoniques, fax, abonnements internet, frais postaux, frais liés à l'édition de bulletins ou revues éditées par le comité, frais liés à l'édition et à la diffusion de procès-verbaux de réunions, etc., mais aussi les salaires et charges sociales des personnes recrutées à titre permanent ou temporaire par le comité et affectées à des postes liés au fonctionnement administratif du comité ainsi que les dépenses pour régler les prestataires de services auxquelles le comité a eu recours (frais d'imprimerie et de reprographie, recours à une société pour retranscrire les enregistrements des réunions, etc.) et finalement les frais occasionnés par les déplacements des membres du comité pour l'exercice de leur mission (sauf pour les cas où cela doit être pris en charge par l’employeur),

- les frais liés à la formation économique des membres du comité d’entreprise (L.2325-44 CT) : frais d'enseignement, de déplacement, d'hébergement, de restauration, etc.,

– la réalisation d’études et d’expertise : pour le recours à un expert libre par exemple (L.2325-41 CT), ou pour une consultation ponctuelle ou permanente dans le cadre de ses attributions économiques et professionnelles (avocat, prestataire de services, etc.) ou pour acheter de la documentation technique pour autant qu'elle soit utile à l'activité économique et professionnelle du comité ou pour financer des campagnes d'information en direction du personnel (Cass. soc. 19/12/90, n°89-16.072).

En aucun cas le budget de fonctionnement ne peut subventionner des acticités sociales et culturelles.

Qu’en est-il dans cette affaire ? Les membres du comité d’entreprise avaient-ils le droit de voter ces deux délibérations dans le but de subventionner des formations syndicales ainsi qu’un abonnement à une presse syndicale ? Non, répond la Cour de cassation. Même si le comité décide librement de l’utilisation de son budget de fonctionnement (au sens où aucune autorisation préalable de l’employeur n’est nécessaire), les dépenses qui s’imputent dessus doivent impérativement s’inscrire dans le cadre du fonctionnement du comité d’entreprise et de ses missions économiques.

Pour les juges, un lien doit exister entre la dépense et la mission légale du comité d’entreprise : les attributions économiques. En soit une dépense pour un abonnement ou une formation est envisageable, mais ces dernières doivent conserver un lien avec le mandat des élus : représentants du personnel au comité d’entreprise et non délégué syndical. Dans les faits, les formations et les abonnements ne se rattachaient pas aux attributions économiques du comité mais à l’exercice de fonctions de nature syndicale. Ils avaient même pour bénéficiaires principaux des représentants syndicaux non membres du comité. Cela n’est pas possible pour la Cour. Le lien entre les dépenses et les missions du comité d’entreprise est impératif.

A noter : Dans un tel cas, l’employeur est en droit de saisir le juge du tribunal de grande instance sous la forme des référés. Celui-ci peut alors ordonner la suspension des décisions illégales du CE, lorsque qu’elles caractérisent un trouble manifestement illicite (nécessaire en cas de référé). La mise en œuvre des délibérations a donc été suspendue.

Extrait de l’arrêt :

« Mais attendu d'abord que le juge du tribunal de grande instance, statuant en référé, a le pouvoir d' ordonner la suspension des décisions du comité d'entreprise dont l'illégalité caractérise un trouble manifestement illicite ;

*Attendu ensuite que si le comité d'entreprise décide librement de l'utilisation des fonds reçus au titre de son budget de fonctionnement, ses dépenses doivent s'inscrire dans le cadre du fonctionnement du comité d'entreprise et de ses missions économiques ;

Et attendu que si la subvention de fonctionnement peut être affectée à la prise en charge d'actions de formation ou d'achat de presse au profit des membres du comité d'entreprise, cette prise en charge doit se rattacher aux attributions économiques du comité ; que la cour d'appel, qui a constaté que les délibérations prévoyaient le financement, sur le budget de fonctionnement du comité d'entreprise, de formations et d'abonnements lecture sans lien avec ses attributions économiques mais se rattachant à l'exercice de fonctions de nature syndicale et dont le bénéfice était en partie étendu à des représentants syndicaux extérieurs au comité, a pu en déduire, abstraction faite du motif erroné mais surabondant visé par la deuxième branche du moyen, que la mise en œuvre de ces délibérations constituait un trouble manifestement illicite qu'il lui appartenait de faire cesser* ».

Conseil à nos syndicats : Faites dorénavant bien attention aux dépenses qui s’imputeront sur votre budget de fonctionnement. Au regard de la jurisprudence, il se semblerait pas que tout abonnement à une presse syndicale soit impossible. Il faut seulement que ladite presse ait un lien avec les attributions économiques du comité dans ce qu’elle traite. Si elle n’aborde que des sujets de nature syndicale, l’abonnement sur les frais du comité ne sera pas possible. Il en est de même pour les formations, le lien avec les attributions économiques du comité est nécessaire.

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