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Dossier/Evénement

ACTUALITE JURIDIQUE - La convocation des travailleurs de nuit à la visite médicale ne peut se faire durant leur temps de repos quotidien

La convocation des travailleurs de nuit à la visite médicale ne peut se faire durant leur temps de repos quotidien (Cass. Soc., 27 juin 2012, n°10-21306).

La Cour de Cassation a affirmé, [dans un arrêt du 27 juin dernier](<../content/cms_medias/pdf/temps de repos.pdf>), que la convocation des travailleurs de nuit à une visite médicale hors de leur temps de travail prive ces derniers de leur droit au repos quotidien de 11 heures.

Dans l’affaire en référence, un salarié travaillant de nuit entre 22h et 6 h50 est convoqué pour une visite médicale à la médecine du travail à 8h00, heure d’ouverture du service de santé au travail. Il ne se présente pas à cette visite médicale obligatoire et est sanctionné par son employeur par une mise à pied disciplinaire. Le salarié saisit alors le Conseil de prud’hommes pour obtenir l’annulation de la mise à pied ainsi que des dommages-intérêts pour violation du repos quotidien de 11 heures consécutives prévues à l’article L3131-1 du code du travail.

L’affaire est portée devant la Cour d’appel qui rejette la demande du salarié au motif que celui-ci a été convoqué à l’heure d’ouverture du service de santé au travail, qui ne fonctionne que durant la journée. Au regard des horaires de ce service, il n’est donc pas possible d’organiser la visite médicale durant les heures de travail du salarié, entre 22 h00 et 6h50. Selon les juges, l’employeur a bien tenu compte du droit au repos du salarié puisque le rendez-vous a été pris suffisamment tôt dans la journée pour ne pas perturber le repos quotidien de 11 heures consécutives qui doit être garanti au salarié. En effet, l’heure de la visite étant fixée à 8h00 le matin, le salarié bénéficie tout de même de 11 heures de repos après la visite, avant de reprendre son travail le soir à 22h00.

Le salarié forme un pourvoi en cassation. A l’appui de son argumentation, il invoque une circulaire relative au travail de nuit (Circ. DRT n° 2002-09) qui prévoit que le repos quotidien doit être pris immédiatement à l'issue de la période de travail. Or, selon le salarié, la convocation à une visite à 8h00 a pour effet d’interrompre ce temps de repos.

Il s’agit alors de savoir si la convocation d’un salarié travaillant de nuit à une visite médicale de jour, sans avoir bénéficié de 11 heures de repos immédiatement après son poste, porte atteinte au droit au repos de ce dernier.

La Cour de cassation répond par l’affirmative et casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel. Les juges estiment que la convocation à 8h00 à la visite médicale a pour effet de priver le salarié de son droit au repos quotidien de 11 heures consécutives. Ils s’appuient sur l’article L3131-1 du code du travail, interprété à la lumière de la directive européenne « temps de travail » (Dir. n° 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003). Selon les juges, la période de repos quotidien débute dès la fin du service du salarié. Ce repos ne peut être interrompu par une visite médicale.

De manière générale, si, en principe, la visite médicale est organisée durant le temps de travail, ce n’est pas toujours possible pour les travailleurs de nuit dont les horaires ne correspondent pas à ceux des services de santé au travail. Dans ce cas, la visite a lieu hors du temps de travail et est rémunérée comme du temps de travail normal (R4624-28 C.Trav.). Désormais, de telles visites ne peuvent plus être organisées durant les 11 heures de repos consécutives dont bénéficient le salarié travaillant de nuit, temps de repos qui débute dès la fin du service. Dans le cas présent, la visite médicale ne pouvait avoir lieu qu’une fois le repos de 11 heures après le poste de nuit, à savoir 6h50 +11 heures : à partir de 17h50.
Cette solution peut poser des problèmes en terme d’organisation pour l’entreprise mais l’objectif est celui de la protection du droit au repos du salarié dont l’importance se trouve réaffirmée par la Cour de cassation. Il semblerait d’ailleurs qu’elle s’applique également pour le temps de repos hebdomadaire de 35 heures composé des 24 heures de repos hebdomadaire prévus à l’article L3132-2 du code du travail et des 11 heures de repos quotidien. Il faudra veiller également que l’amplitude horaire maximale de 13 heures, qui s’apprécie par poste de travail pour les travailleurs de nuit et non de 0 à 24 heures, soit également respectée.

Dans le cas d’espèce, l’entreprise aurait probablement dû anticiper le terme du poste de nuit, pour qu’une fois le repos de 11 heures pris, le salarié puisse se rendre au service de santé au travail pendant ses horaires d’ouverture…

Extraits de l’arrêt :

« Sur le deuxième moyen :

Vu l'article L. 3131-1 du code du travail, interprété à la lumière de la Directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, modifiée par la Directive 2000/34/CE du 22 juin 2000 et remplacée par la Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande au titre de la violation du droit au repos quotidien, l'arrêt retient que convoqué à 8 heures ou 8 heures 30, c'est-à-dire dès l'ouverture des services de la médecine du travail qui fonctionnent seulement aux heures ouvrables de la journée, le salarié pouvait bénéficier de 11 heures de repos consécutif avant de reprendre le travail en soirée vers 22 heures, qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à l'employeur qui avait organisé ces visites en tenant compte des horaires du médecin du travail et de la nécessité de les prévoir en dehors des horaires uniquement nocturnes du salarié ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que le salarié terminait son service à 6 heures 50 du matin, de sorte qu'une visite médicale fixée à 8 heures du matin le privait de 11 heures de repos consécutives prenant effet à la fin de son service, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations

[…]

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de M. X.. au titre des frais d'entretien d'uniforme, l'arrêt rendu le 13 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ».

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